jeudi 6 mars 2014

Shantala

Je m'appelle Sambram. Je n'ai que 4 mois. J'habite dans le petit village de Dothrabandi à 5 kilomètres de Pothnal, district de Raichur. Je suis le second garçon de la famille et le cousin de Sushma, la fille de Yayasheela, mon oncle qui habite la maison voisine. Sumitra, ma maman, s'occupe parfaitement bien de moi mais c'est ma Mamy qui assure le massage et le bain quotidien.

En voyant ce rituel se dérouler sous mes yeux, je me suis souvenu de "Shantala", le très beau livre de Frédéric Le Boyer, qui à travers ses images noir et blanc, donnait à voir cette pratique ancestrale du massage et le bien-être apporté à l'enfant qui s'apaise, se détend et communique dans une relation de peau à peau avec la personne qui le masse.

Les semaines qui suivent la naissance sont comme la traversée d'un désert. Désert peuplé de monstres: les sensations nouvelles qui du dedans montent à l'assaut du corps de l'enfant. Après la chaleur du sein maternel, après la folle étreinte qu'est la naissance, la solitude glacée du berceau, et puis surgit un fauve, la faim, qui mord le bébé aux entrailles. Ce qui affole le malheureux enfant, ce n'est pas la cruauté de la blessure, c'est sa nouveauté. Et cette mort du monde à l'entour qui donne à l'ogre des proportions immenses. Comment calmer une telle angoisse?



Nourrir l'enfant? Oui. mais pas seulement de lait. Il faut le prendre dans les bras. Il faut le caresser, le bercer et le masser. Ce petit, il faut parler à sa peau, il faut parler à son dos qui a soif et faim autant que son ventre. Dans les pays qui ont conservé le sens profond des choses, les femmes savent encore tout cela. Elles ont appris de leur mère, elles enseignent à leurs filles cet art profond, simple et très ancien qui aide l'enfant à accepter le monde et le fait sourire à la vie. (F.L.,1976)