mercredi 15 juin 2011

Libérer les videuses de latrines

Selon une enquête du "Monde Magazine" du 11 juin 2011, la moitié des Indiens n' a pas de w.c. ou se contente de latrines d'un autre âge vidées chaque jour par des femmes situées au plus bas de l'échelle sociale.


Quiconque a voyagé en Inde a vu ces rangées d'hommes de tous âges, accroupis le long des routes dès les premières heures du jour pour soulager leurs besoins à l'air libre. Les femmes sacrifient à cette obligation dans l'obscurité de la nuit pour échapper aux regards des autres. Il sont ainsi plus de 600 millions à évacuer les matières fécales dans la nature. Cette absence d'équipements sanitaires, ce manque d'hygiène sont à la cause de centaines de milliers de morts chaque année. Beaucoup de toilettes existantes sont de simples latrines, sans chasse d'eau ni fosses septiques, qu'il faut vider chaque jour. Un travail que l'on confie aux Dalits (Intouchables), ces hommes et ces femmes hors castes, chargés de faire la tournée des latrines en échange de quelques roupies.

Un homme, Bindeshwar Pathak,  a décidé de mettre un terme à cette situation. il en a fait le combat de sa vie. A l'instar de Gandhi qui  déclarait vouloir libérer ces "scavengers de la pratique inhumaine, malsaine et haïssable de transporter des excréments sur leur tête", Bindeswar Pathak a fait le serment de réaliser le voeu du Mahatma: "Désormais je ne ferais que çà: éradiquer l'intouchabilité et sortir les scavengers de leur condition". Pour y parvenir, il a bien compris que le seul moyen efficace serait de créer un alternative simple et bon marché. 

Il a donc inventé un système de w.c. à la turque, à double fosse, qui permet de transformer  les matières en compost pendant que l'autre se remplit. Il a fait le pari audacieux de w.c payants (une roupie, soit moins de deux centimes d'euros). Grâce au soutien de l'Organisation mondiale de la Santé, ce sont plus de 1,2 million de toilettes et de blocs sanitaires qui ont été ainsi créés. Et les videuses de latrines ont pu apprendre un autre métier et se reconvertir dans d'autres travaux plus nobles (couture, tissage, fabrication de galettes etc.). En Inde, on peut encore changer la vie des pauvres avec peu de chose: de simples water-closets.