samedi 16 mars 2013

Les petits riens de la vie

L'histoire se passe dans le Kerala, au Sud de l'Inde. Rahel, une jeune femme de 31 ans, retourne dans son village natal après des années d'errance. Elle y retrouve son frère jumeau, Estha, qui vit prostré et replié sur lui-même. Lorsqu'ils étaient enfants, ils ont vécu un drame familial qui a bouleversé leur vie.

Ils ont tout juste huit ans. Profondément attachés l'un à l'autre, ils vivent entourés de leur grand-mère, Mammachi, qui fait d'étranges confitures, de leur oncle Chacko, communiste à ses heures, de la grand-tante Baby Kochama, qui nourrit une passion quasi mystique pour un prêtre irlandais, de la jeune Sophie, lointaine parente venue de Grande-Bretagne, d'Ammu, leur mère divorcée qui se laisse emporter dans un amour interdit, de Velutha, le menuisier-charpentier de la classe des Intouchables qui va transgresser l'ordre social le conduisant à sa perte...

Ces petits riens de la vie, ce sont tous ces évènement qui se succèdent, qui grandissent et affectent profondément le comportement des gens. A l'opposé du dieu des Grandes Choses, qui impose sa vérité à coups de dogmes et d'exclusion, le dieu des Petits Riens oeuvre au souci de l'autre et ne craint pas ce qu'il ignore. Mais comment aimer quand on a grandi en manque de repères dans un monde qui veut sauver les apparences sous d'opaques stratégies et mensonges.

Composé d'incessants aller et retours narratifs, ce roman peut dérouter le lecteur en raison de son architecture complexe. Son auteur, Arundhati Roy, vient du cinéma et elle n'hésite pas à brouiller les pistes, enchainant les souvenirs par petites touches, de façon non chronologique, afin qu'ils entrent petit à petit en résonance et convergent vers l'issue fatale.

Ecrivaine et militante pacifiste, Arundhati Roy est née en 1961 d'un père hindou et d'une mère chrétienne. Elle a grandi dans le village d'Ayemenem dans l'Etat communiste du Kerala où cohabitent hindouisme, christianisme et Islam. Dans ce roman en partie aubiographique écrit en anglais (Prix Booker 1997), elle porte un regard extrêmement lucide sur la réalité indienne.  Elevée au bord d'un fleuve, l'auteur nourri son livre de nature, de senteurs, de lumières qui respirent l'authenticité. C'est dire tout l'intérêt de ce roman subtil, écrit dans un langue foisonnante et poétique émaillée d'images et de métaphores.