jeudi 5 juillet 2018

Un combat pour la liberté

Iram Haq, actrice, scénariste et réalisatrice de 42 ans, a réalisé ce film (titre original: "What will people say") à partir de son histoire personnelle, celle qu'elle a elle-même vécue il y a 25 ans.

Comme Nisha, 16 ans, jeune norvégienne d'origine pakistanaise, elle a vécu son adolescence dans le pays où sa famille avait émigré dans l'espoir d'y trouver une vie meilleure et plus facile. Comme elle, elle a souffert d'une culture et d'un mode patriarcal où tradition et religion guident tous les comportements. Promise à un avenir d'avocate ou de médecin, elle sera la fierté de sa famille, à condition de ne pas s'intégrer au pays d'accueil, en refusant ses pratiques et ses moeurs, ses libertés individuelles et sexuelles. Surprise par son père avec un garçon, Nisha est battue, séquestrée, avant d'être conduite de force au Pakistan pour y être éduquée selon les rites et les diktats imposés par la famille de son oncle. Leur seul credo: éviter à tout prix la mauvaise réputation dont sont victimes ceux qui ne respectent pas les codes imposés par la communauté. Fussent au prix des non-dits, des mariages forcés et des rapports familiaux d'une violence insupportable.

Adil Hussain, déjà vu dans "l'Odyssée de Py" et dans "La saison des femmes", incarne un père à la fois intraitable et aimant transpercé par ses conflits intérieurs. Maria Mozhdah endosse à la perfection le rôle de cette jeune adolescente ordinaire et rebelle que rien n'arrête et qui ira jusqu'au bout de son combat pour la liberté. Avec une puissance inouïe et une parfaite maîtrise de la mise en scène (les scènes du Pakistan ont été tournées en Inde), Iram Haq nous livre un film politique audacieux, terrifiant, et parfaitement lucide sur les questions de la manipulation, de l'oppression et de la honte, dans une société qui n'en finit pas démêler ses contradictions.

Iram Haq explique que les conflits culturels et générationnels attraient au contrôle social, au fait que tout le monde soit piégé. La fille, le père, la mère, le frère... ils sont tous contraints par leur univers et surtout par les autres. "Même en Norvège, je remarque que les gens font très attention au regard des autres et accordent beaucoup d'importance à ce que leurs voisins diront. C'est le contrôle social et c'est le sujet qui m'intéresse le plus dans cette histoire. Pourquoi faisons-nous ce que les autres attendent de nous. Pourquoi ne pas simplement faire ce que nous sentons être la bonne chose, au fond de nous?... Le bonheur dépend uniquement de notre instinct, et dans quelle mesure nous choisissons de l'écouter. Notre instinct a toujours raison, il sait pertinemment ce qui est bon pour nous. Et même s'il nous arrive de faire quelques erreurs, le simple fait d'écouter notre coeur prouve que nous sommes sur le bon chemin...  Les gens doivent se débarrasser de ces sentiments de honte qui les hantent systématiquement et contrôlent le moindre détail de leur vie... Discuter est le meilleur moyen de se comprendre. Je crois en la parole libre, en la pensée libre et je les défendrais toute la vie. Ouvrez votre esprit! Il n'y a pas qu'une manière de penser. Il existe des centaines de manière de penser."